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27 mars 2024

Antoine Nérilus: Un astre d’or montant de la poésie haïtienne

Travailleur impénitent de « poèmes » et éplucheur de « vers », Antoine Nérilus dit Nérilio s’immisce de façon inattendue au cercle des voix des poètes haïtiens qui s’imposent comme une obsession féérique avant même qu’il n’ait eu le temps de se présenter au grand public.

Antoine Nérilus: Un astre d’or montant de la poésie haïtienne

Par : Michélot Oxil

N’en cherchez pas plus pour aller à sa rencontre. Politologue et professeur de langues de carrière, le jeune homme semble avoir un talent confirmé. Entre un assemblage de vers folklorique et la déflagration multicolore d’un amoureux fou de la femme haïtienne, le poète-slameur, amant aussi de proses, soumis à l’étincelle progressive, calme et bouillonnante, hume et parfume l’évidence d’une trance poétique.  » Tu suffoques d’extase sous la chaleur de mes doigts…ne voulant point toucher mon corps…tantôt visible tantôt fictif…. (extrait de douce missive à Penbèch) ». Trop souvent plongé dans un tourbillon hypnotique, Nérilio mélange tout un euphémisme d’écriture qui rappelle les plus belles pages poétiques d’Oswald Durand et de tous les autres chantres de la beauté et de la douceur de la femme haïtienne.

Qui d’autres après lui, en ce temps de somnolence pour remettre la gente féminine à l’honneur ?

« Assise entre mes doigts, je triomphe fièrement…même cloîtré tu ne me laisses jamais seul… ». Se borne-t-il aux limites de « l’amour » ou touche-t-il d’autres sujets ? Certainement. Parfois, il fait du slam engagé pour décrire le « mal-être haïtien ». Bien qu’il ne fasse pas « de bruit», dans un paysage qu’il dessine avec aisance et délicatesse, ses vers « esthétiquement » bien rimés, font l’écho d’une poésie inspirée d’un vécu face auquel on ne peut avoir qu’admiration.  » Si w wè depi w gade m, m ogadavou, si w wè je m kaye dlo, lè tristès frape pòt kè w, pa fache avè m« . Éthéré et emporté, le talent poétique de Nérilio est certain. L’écouter slamer fait monter l’eau à la bouche. C’est ce qui prouve d’ailleurs que la structure de ses poèmes, sans parler de ses arrangements mythiques, est d’une beauté exceptionnelle. En puisant dans son for intérieur, Nérilio nous rappelle l’essentiel dont nous ne pouvons plus nous en défaire. L’amour, pense-t-il, se dit autant qu’il se vit. « Si anba kou w se tetin bibwon m, si m vle ekri lavni pa m ak lank rèv pa w… ».

Je n’ai jamais vu un poète-slameur aussi profond. À travers ses « slams », il livre un petit morceau de ce qu’il est. Sur sa chaine YouTube, ( https://youtu.be/Z5kyOAu8W5k)il dépose des chef-d ‘œuvres sensationnels (Cheri pa fache avè m, yon nwit blanch, douce missive à Penbèch, ect) qui résonnent comme le déferlement des vagues sur une côte déserte. Élégance et cadence s’entrelacent; fluidité et dextérité invitent ses auditeurs à l’écouter. C’est pourquoi, il importe de le libérer de son anonymat.